Et si je vous disais que le développement du langage oral chez votre enfant repose (entre autres) sur la qualité de sa respiration et de sa déglutition ? Ces fonctions, souvent négligées parce qu’elles paraissent naturelles, influencent pourtant la posture de la langue, la tonicité des muscles oro-faciaux et, in fine, la clarté de l’articulation. Ainsi, un enfant qui respire par la bouche ou qui présente une déglutition dysfonctionnelle peut rencontrer des difficultés à produire certains sons, voire s’inscrire dans un retard de langage global. Dans cet article, vous allez découvrir en quoi la déglutition et la respiration nasale sont à la fois essentielles et perfectibles, grâce à des exercices ciblés ! Ces exercices auront notamment pour but de favoriser la rééducation de la déglutition.

La déglutition, un socle du langage oral

La déglutition est l’acte qui permet d’avaler la salive, les liquides et les aliments mâchés. Ce mécanisme, qui nous semble éminemment automatique et naturel, se construit tout au long de plusieurs étapes de maturation.

Comment se développe une déglutition fonctionnelle ?

Chaque enfant suit un développement unique : il existe donc des variations dans l’acquisition de ses compétences, sans que cela ne constitue une pathologie. 

Si vous avez des doutes sur le caractère fonctionnel de la déglutition de votre enfant, n’hésitez pas à demander conseil à une orthophoniste. Grâce à un bilan orthophonique ciblé, elle saura détecter un éventuel trouble ou vous rassurer sur l’évolution de votre enfant.

De la naissance à 6 mois : la déglutition primaire

Le nourrisson possède une déglutition infantile. La langue pousse contre les gencives ou les dents pour faciliter la propulsion et l’absorption du lait. C’est un mouvement naturel, adapté aux besoins du tout-petit, mais il va évoluer.

De 6 mois et 2 ans : transition vers la déglutition adulte

Avec l’introduction des aliments solides et le développement de la mastication, la langue commence à adopter une posture plus haute, se plaçant progressivement sur le palais, au repos. Elle ne pousse donc plus sur l’arc dentaire.

Exercices rééducation déglutition

À partir de 3 ans : mise en place d’une déglutition fonctionnelle

Petit à petit, une position linguale physiologique se met en place : la langue est bien positionnée (au contact du palais), les lèvres sont jointes et on observe un bon tonus musculaire. À cet âge, il est intéressant que les habitudes de succion (pouce/tétine) soient écartées.

4 caractéristiques d’une déglutition physiologique

C’est la déglutition « normale », celle qui se met en place naturellement au fil du temps, généralement vers 6 ans maximum, lorsque l’occlusion dentaire est bien établie. 

  1. La langue repose sur le palais derrière les incisives supérieures (au niveau des papilles palatines) lors de la déglutition.
  2. Les lèvres sont détendues, et les muscles des joues ne sont pas en tension.
  3. Il n’y a pas d’effort excessif des muscles du visage ni de pression des dents contre la langue.
  4. La croissance des dents et de la mâchoire est équilibrée, ce qui favorise une bonne articulation et une bonne respiration nasale.

Voici une représentation en mouvement de l’anatomie de la déglutition

Exemple de déglutition atypique

On parle de déglutition atypique ou dysfonctionnelle lorsque l’enfant conserve un schéma « immature », à savoir : 

  • La langue pousse vers l’avant lorsque l’enfant avale et reste basse dans la bouche.
  • Les lèvres ne se ferment pas complètement ou au contraire, se ferment avec force pour compenser l’inefficacité de la langue.
  • L’enfant utilise des compensations musculaires (lèvres/joues) pour avaler.

Noah : trouble articulatoire et déglutition atypique

Noah est un enfant de 6 ans qui est amené en bilan orthophonique par sa maman. Elle a observé une difficulté à articuler certains sons comme /s/, /z/, /ch/ ou /j/. Noah prononce « sato » au lieu de  « château » ou « zardin » au lieu de « jardin ». À l’examen, l’orthophoniste constate la présence le trouble d’articulation, mais remarque aussi la présence d’une déglutition dysfonctionnelle, avec une langue hypotonique et positionnée sur le plancher buccal.

À noter : une déglutition dysfonctionnelle peut entraîner un trouble articulatoire, mais la présence d’un trouble articulatoire, de parole ou de langage ne signe pas forcément un trouble de la déglutition. 

Pourquoi travailler la déglutition chez l’enfant ?

Si elle le juge utile, l’orthophoniste va donc proposer à Noah de démarrer une prise en charge de « Rééducation de la déglutition dysfonctionnelle », pour ensuite aller travailler le trouble d’articulation. En effet, en rétablissant la fonction oro-myo-fonctionnelle, Noah va développer une meilleure position de langue, ce qui précisera l’articulation des sons. Corriger une déglutition atypique permet donc de favoriser la précision du message oral, tout en prévenant des troubles fonctionnels à long terme.

Déglutition et respiration nasale : le combo gagnant

Saviez-vous que respirer par le nez n’est pas un simple réflexe ? C’est au contraire un mécanisme-clé pour la santé en général, et le développement du langage, en particulier. 

Le nourrisson a une respiration exclusivement nasale et une déglutition primaire, favorisées par la structure de son anatomie. Vers 2 ans, la respiration est toujours principalement nasale et une respiration buccale signe généralement un problème ORL  (amygdales hypertrophiées, rhinites fréquentes). Vers 4 ans, la respiration nasale est automatique et un modèle de déglutition adulte est en cours de stabilisation.

Les bénéfices d’une respiration par le nez

D’abord, le nez agit comme un filtre naturel qui capture les impuretés, les bactéries et les allergènes. Ensuite, la respiration nasale sollicite le diaphragme, pour une respiration ventrale profonde et régulière. Enfin, lorsque l’enfant respire par le nez, sa bouche reste fermée et sa langue repose contre le palais. Cela favorise un certain tonus musculaire nécessaire à l’articulation.

Lorsqu’un enfant respire par la bouche, sa langue reste basse, ses muscles orofaciaux ont tendance à s’affaisser, ce qui impacte la mastication et la déglutition. En outre, son sommeil peut être perturbé par des apnées du sommeil ou des ronflements, avec un risque d’infections ORL accru (rhinites, otites).

Bon à savoir : Un enfant qui dort la bouche ouverte et respire par la bouche en journée peut présenter une fatigue chronique qui va affecter sa concentration et donc, ses apprentissages scolaires. Si vous observez des ronflements, des pauses respiratoires, une sudation excessive la nuit ou encore des traces de salive sur l’oreiller, pensez à consulter un médecin du sommeil qui se prononcera sur la présence de potentielles apnées. 

Comment encourager la respiration nasale ?

Vous voulez aider votre enfant à prendre conscience de sa respiration et à corriger ses mauvaises habitudes ? Après avoir écarté toutes les causes physiologiques, des exercices simples permettent de rééduquer cette fonction.

Exercices déglutition respiration

Travailler la déglutition et la respiration nasale en 5 exercices

Pour acquérir une déglutition fonctionnelle et une respiration nasale, l’orthophoniste de votre enfant va lui proposer un plan de soin personnalisé. À la maison, vous pouvez, vous aussi, l’aider à prendre conscience de sa position de langue et de sa respiration. 

Un seul mot d’ordre : s’exercer dans la bonne humeur et avec douceur, pour ne pas brusquer votre enfant. Ce qui vous semble « facile » et naturel peut représenter une montagne pour lui, alors avancez à petits pas, en célébrant chaque victoire !

Exercices pour une rééducation de la déglutition

  1. Inciter l’enfant à monter la langue en déposant une pointe de confiture sur l’arc de cupidon, qu’il doit toucher. 
  2. Poser la pointe de la langue sur le palais et la maintenir pendant 10 secondes. Même chose, ouvrant progressivement la bouche, sans descendre la langue. 
  3. Poser une miette de pain sur le palais et essayer de l’y maintenir en place avec la langue

Exercices pour améliorer la respiration nasale

  1. Inspirer par une narine, expirer par l’autre comme dans la respiration alternée du yoga.
  2. Faire vaciller la flamme d’une bougie sans l’éteindre, en soufflant longuement par le nez.

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Le développement du langage oral chez l’enfant est une question d’équilibre. En l’occurrence, une déglutition fonctionnelle et une respiration nasale sont des facteurs qui favorisent une évolution positive, avec une articulation en place. Grâce à des exercices ludiques, vous pouvez, parents, aider votre enfant à corriger ces fonctions et connaître un développement langagier optimal. En cas de doute, sollicitez une orthophoniste pour un bilan qui mettra ou non en évidence un besoin de prise en charge. 

À retenir 

  • Si une déglutition dysfonctionnelle persiste, elle peut entraîner des troubles de l’articulation et des problèmes orthodontiques (béance dentaire, malposition des dents).
  • Une respiration exclusivement buccale doit être corrigée rapidement pour éviter des problèmes myofonctionnels.
  • Observer votre enfant (de jour et de nuit, si vous soupçonnez une apnée du sommeil) permet de repérer d’éventuels signes d’alerte et de mettre en place une prise en charge adaptée.
  • Si votre enfant conserve la bouche ouverte en journée (hors troubles ORL identifiés), vous pouvez remonter son menton en douceur pour l’aider à penser à fermer la bouche.