Lorsque le diagnostic de dyslexie est posé pour un enfant, on se sent parfois dépassé, en tant que parent. La bonne nouvelle, c’est que vous allez être conseillé par des professionnels en ce qui concerne la prise en charge orthophonique ou les aménagements à mettre en place dans la sphère scolaire. Mais comment se projeter dans un futur scolaire ou professionnel, avec une dyslexie dans le tableau ? Que dire à votre enfant pour la rassurer, l’encourager et l’aider à se forger une image positive et joyeuse de sa vie d’adulte ? Oui, la dyslexie est un trouble durable et il va falloir articuler la vie scolaire, puis professionnelle, autour de ces difficultés. C’est un défi. Mais c’est aussi une façon particulière de fonctionner, des compétences qui sortent de l’ordinaire. Et si être dyslexique était une chance ?
Rappels sur le trouble spécifique du langage écrit
Définition
La dyslexie, qu’on appelle aussi trouble spécifique du langage écrit, s’exprime par une difficulté structurelle et durable portant sur la lecture. On se rend compte que l’enfant ne parvient pas à acquérir les mécanismes de la lecture, ni à les automatiser.
La dyslexie existe en dehors d’une déficience intellectuelle ou d’un trouble de la vision/audition. Elle appartient à la grande famille des troubles dys, comme la dysorthographie, la dysphasie ou encore la dysgraphie.
Le trouble spécifique de la lecture est dit « neurodéveloppemental » puisqu’il apparaît au cours de la croissance de l’enfant, en exprimant un fonctionnement cérébral atypique.
L’Éducation Nationale évoque une proportion de 600 000 élèves dyslexiques, majoritairement des garçons.
Par ailleurs, il existe 3 types de troubles de la lecture : on parle ainsi de dyslexie phonologique, de surface ou mixte.
Manifestations d’un trouble de la lecture
Il faut savoir qu’un trouble spécifique de la lecture est le plus souvent accompagné d’une dysorthographie, de degré variable. Par ailleurs, selon le type de dyslexie, les symptômes exprimés seront différents.
On retrouve fréquemment :
- Des confusions entre les lettres visuellement proches, par exemple.
- Des inversions de lettres ou de syllabes.
- Une difficulté à déchiffrer les mots inconnus ou complexes.
- Des découpages arbitraires des mots.
- Des erreurs de conjugaison et de grammaire.
- Une mémoire peu fiable, surchargée d’informations.
- Des difficultés d’ordre spatial (sauts de ligne, oubli de mots, mauvais repérage sur la feuille).
- Une mauvaise compréhension des textes
Par ailleurs, un enfant dyslexique est un enfant fatigable, qui fait des efforts à longueur de journée, souvent peu récompensés. Cela engendre fréquemment des problèmes d’estime de soi, voire de socialisation. C’est la raison pour laquelle un suivi psychologique est souvent une bonne indication, en complément du travail en orthophonie.
Être dyslexique : un avantage pour l’avenir ?
Il n’est pas question ici de romantiser la dyslexie. Un tel diagnostic engendre forcément des inquiétudes, des contraintes, des soins, des aménagements scolaires. Bref, accompagner son enfant dyslexique, cela peut ressembler à un parcours du combattant.
Néanmoins, pour que les enfants porteurs d’un trouble de la lecture puissent avoir confiance en l’avenir et se projeter dans une vie professionnelle, il peut être utile de souligner leurs potentialités, étayées par plusieurs études intéressantes.
Une dyslexie, comme tout « trouble », renvoie de prime abord une image négative.
Quelque chose « manque ». Quelque chose « ne fonctionne pas correctement ».
Et pourtant, en juin 2022, une étude portée par Helen Taylor et Martin Vestergaard met en lumière l’impact de ce fonctionnement cérébral différent, qui aurait participé activement à l’adaptation de l’espèce humaine, au fil de l’Histoire !
La thèse soutenue par les chercheurs est que les personnes mises n’ayant pas un accès facile au langage écrit développent un intérêt et des compétences intéressantes en matière d’exploration de leur environnement. Comme une façon de compenser ce manque. Cette connaissance accrue leur permet alors de prendre des décisions basées non sur des hypothèses, mais sur des informations concrètes issues de leurs observations du monde.
Les chercheurs affirment que cette compétence confère aux personnes dyslexiques une tendance à l’inventivité et à la créativité, ainsi qu’une facilité dans la prise de décision et le passage à l’action.
Enfin, l’étude avance le fait que le « cerveau dyslexique » a forcément été privilégié au fil de l’évolution et conclut carrément à un rôle primordial dans la survie de l’espèce humaine ! Un angle de vue intéressant sur ce trouble, perçu aujourd’hui comme un handicap dans un monde où l’écrit est omniprésent.
« La dyslexie correspond à une spécialisation dans l’exploration plutôt qu’à un dysfonctionnement ou une aberration »
Helen Taylor et Martin David Vestergaard, chercheurs.
La dyslexie d’après LinkedIn
LinkedIn, le plus grand réseau social professionnel, s’est intéressé à la dyslexie, par l’intermédiaire du groupe Virgin Radio. Ce n’est pas un hasard, puisque Richard Branson est lui-même porteur de ce trouble neurodéveloppemental.
Diagnostiqué à l’âge de 8 ans, il quitte le cursus scolaire à 16 ans pour monter sa première entreprise 4 ans plus tard. Depuis, il a eu le succès qu’on lui connaît ! Il affirme ainsi que sa dyslexie est un élément clé de son parcours, qui lui a toujours donné une perspective différente du monde des affaires.
Sur LinkedIn, il est donc maintenant possible de cocher la « Pensée dyslexique » dans la section Profil Professionnel, comme un talent à promouvoir.
Mais qu’est-ce que cela implique exactement ?
L’idée, c’est de souligner les potentielles compétences des personnes dyslexiques et de participer à la visibilité de cette particularité de pensée. Il s’agit de faire passer les habiletés professionnelles au premier plan, au-delà de la pathologie, et de valoriser l’intérêt pour les entreprises à embaucher ce genre de profil.
Considérer la dyslexie comme une force ?
Si votre adolescent a été diagnostiqué dyslexique, nous vous conseillons d’écouter avec lui ce podcast appelé « La dyslexie est aussi une force » où Mathilde Fontez, rédactrice en chef d’Epsiloon, évoque les avantages à être dyslexique.
Encore une fois, il n’est pas question de nier les difficultés et les contraintes des personnes porteuses d’un trouble spécifique du langage écrit, mais de faire le point sur les potentialités d’un fonctionnement cérébral différent.
En l’occurrence, Mathilde Fontez évoque :
- Une meilleure vision d’ensemble.
- Une résolution des problèmes plus efficace.
- Des capacités d’anticipation.
- L’invention de solutions créatives face aux problèmes.
Partant du principe que les mécanismes de l’écriture et de la lecture ne sont pas correctement automatisés, tout se passe comme si le cerveau des personnes dyslexiques était en réinvention et en ajustement permanent. De fait, il explore de nouvelles stratégies avec facilité.
Bien sûr, l’accès à la lecture et à l’écriture est un prérequis important dans une vie professionnelle. Mais ce que montre l’étude, c’est que lorsque les aménagements pertinents sont opérés (temps additionnel, logiciel de lecture et de correction orthographique, par exemple), les dyslexiques montrent des compétences précieuses.
Leurs domaines de prédilection ? L’art, le design, l’ingénierie, l’entrepreneuriat en général. D’ailleurs, on apprend qu’aux États-Unis, près de 35 % des entrepreneurs sont dyslexiques ! Et près de 50 % des millionnaires autodidactes dans le monde également !
« Cela m’a appris à être plus créatif, à trouver des solutions rapides aux problèmes en utilisant mon intuition et mes expériences plutôt que de simplement suivre les instructions d’un livre ».
Ingvar Kamprad, fondateur d’Ikea.
La dyslexie et l’entrepreneuriat
L’entrepreneuriat, justement, est un secteur dans lequel les personnes dyslexiques semblent s’épanouir, mais pourquoi ? Julie Logan, professeur à la Cass Business School de Londres, dégage ainsi 5 raisons pour lesquels les dyslexiques font de grands entrepreneurs :
- Les dyslexiques montrent un vrai sens de l’innovation
Ils ont ainsi comme point commun d’aimer changer l’ordre établi, de communiquer efficacement et de ne pas avoir peur du changement. Habitués à trouver des stratégies pour lire et écrire, les dyslexiques semblent disposer d’une agilité d’esprit et d’une créativité fortes.
- Les dyslexiques savent faciliter les concepts
Plutôt que de bloquer face à une difficulté, les personnes dyslexiques montrent une véritable opiniâtreté dans la recherche de solution et se montrent particulièrement efficaces pour vulgariser des concepts compliqués.
- La curiosité est une qualité des dyslexiques
Comprendre, poser des questions, se passionner pour un sujet, voilà un super pouvoir ! D’autant plus que le cerveau dyslexique a une habileté forte à la visualisation globale, à la prise en compte d’un projet dans toutes ses dimensions.
- Les dyslexiques savent communiquer à l’oral
Pour compenser les difficultés en lien avec le langage écrit, on sait que les personnes dyslexiques développent des compétences intéressantes dans d’autres domaines : la communication orale en est un.
- Une disposition naturelle au leadership
Motiver, inspirer, manager une équipe sont des compétences accessibles aux personnes dyslexiques. On peut relier cela à une intelligence émotionnelle accrue. Certains chercheurs relient ces fortes capacités d’empathie et de résilience, à la multiplication des obstacles à affronter, depuis le plus jeune âge.
Des dyslexiques célèbres et talentueux
Parce que le quotidien d’un enfant dyslexique (et de ses parents) peut être un vrai marathon, il peut être intéressant d’avoir en tête des exemples de parcours positifs, ponctués de succès.
En effet, il est important pour un enfant porteur d’un trouble dys de pouvoir se projeter dans un avenir professionnel prometteur.
Saviez-vous qu’il existe de nombreux exemples de dyslexiques célèbres et talentueux ?
Des présidents et des hommes politiques
On peut penser à Winston Churchill, John Fitzgerald Kennedy, Georges Bush, mais aussi à l’actuel roi d’Angleterre Charles III et à son fils Harry.
Des auteurs dyslexiques
Axer sa vie professionnelle autour de la lecture et surtout de l’écriture lorsqu’on est porteur d’un trouble spécifique, c’est une sacrée gageure ! Et pourtant, on peut citer la romancière Agatha Christie, Edgar Allan Poe, Hemingway ou encore Jules Verne et Flaubert.
Des artistes porteurs de troubles dys
Dans le domaine de l’art, les personnes dyslexiques sont nombreuses. On prête d’ailleurs souvent aux dyslexiques des dispositions intéressantes en la matière.
Citons par exemple Léonard de Vinci et Picasso. Du côté de la chanson, on trouve Johnny Hallyday, Mika et Robin Williams. Si on regarde du côté du cinéma, il y a Steven Spielberg, Harrison Ford, Jack Nicholson, Dustin Hoffman, Whoopi Goldberg ou encore Patrick Dempsey et Keira Knightley.
À retenir !
- Un diagnostic de dyslexie est une épreuve pour la personne concernée et son entourage.
- Néanmoins, il est important de pouvoir se projeter et construire un projet scolaire, puis professionnel s’appuyant sur les ressources de la personne dyslexique.
- Un enfant dys a besoin de figures auxquelles s’identifier pour se construire et rester motivé malgré les difficultés quotidiennes.
- Le fonctionnement cérébral des dyslexiques est riche et plein de potentialités !
Sources
Des articles intéressants à lire pour les parents, mais aussi pour les adolescents : De l’avantage d’être dyslexique et Être dyslexique, ce n’est pas être bête.
Je suis dyslexique, un film d’animation bouleversant et porteur d’espoir.
Dys et célèbres, un livre qui explique que la dyslexie peut rendre plus fort.
Dyslexique fantastique, un album dans lequel l’héroïne découvre ses super pouvoirs !