Dans la famille des troubles dys, il y a une pathologie moins connue qui s’appelle la dysphasie. Aussi qualifiée de « trouble primaire du langage oral », elle fait partie des troubles neurodéveloppementaux qui sont par définition durables. Elle peut toucher le versant expressif et/ou compréhension du langage oral. Il existe différents types de dysphasie, différents niveaux de sévérité, mais ce sont tous les espaces de vie de l’enfant qui sont touchés. En effet, le langage est partout et l’enfant dysphasique ne parvient pas à le comprendre, ni à l’utiliser avec facilité. Si vous connaissez un enfant atteint de dysphasie et que vous voulez savoir comment l’aider, cet article va répondre à vos questions. À commencer par : qu’est-ce que la dysphasie ?
Les causes du trouble primaire du langage oral
La dysphasie est une pathologie du langage qui touche environ 2 % de la population, avec une prévalence chez les garçons. Elle affecte non seulement les capacités d’expression orale, mais aussi de compréhension.
On ne connaît pas précisément la cause de ce trouble dys.
On parle d’une origine génétique, car des antécédents familiaux, diagnostiqués ou non, existent parfois. Mais on évoque aussi un fonctionnement différent au niveau cérébral.
Différentes formes de dysphasie
On distingue généralement 5 types de dysphasie.
- La dysphasie réceptive se caractérise principalement par des difficultés de compréhension du langage oral.
- La dysphasie phonologico-syntaxique se manifeste par de mauvaises constructions de phrases et un trouble d’articulation massif, avec une tendance à complexifier les mots. C’est la forme la plus fréquente.
- La dysphasie lexico-sémantique impacte l’expression. L’enfant peine à trouver ses mots et utilise une syntaxe incorrecte.
- La dysphasie sémantico-pragmatique provoque un langage pauvre, des formules plaquées, un vocabulaire approximatif qui lèse aussi la compréhension.
- La dysphasie phonologique se traduit essentiellement par des déformations de mots qui peuvent rendre le discours inintelligible.
Les symptômes de la dysphasie
On parle rarement de dysphasie en première intention, à part si le tableau est massif et très évocateur. Le plus souvent, l’hypothèse diagnostique de départ va porter sur un trouble de langage oral. Si ces troubles sévères résistent à la rééducation orthophonique, n’évoluent que très lentement, alors on s’interrogera sur l’éventualité d’une pathologie structurelle.
Voici les symptômes les plus courants, qui peuvent se cumuler ou exister de façon isolée.
- L’enfant peine à trouver le mot exact dont il a besoin, il est très lent lorsqu’il raconte une anecdote par exemple. Il cherche ses mots et utilise pour compenser des expressions fourre-tout (« truc, machin, chose »).
- Certains mots sont déformés, les sons sont chamboulés ou l’ordre des mots est perturbé au sein des phrases.
- L’enfant dysphasique a du mal à comprendre et à parler de l’abstrait, des concepts, des sentiments, comme s’il n’avait pas le langage adéquat.
- Les conjonctions et les mots de connexion en général sont mal employés : donc, parce que, à cause de… Idem pour les notions spatiales et temporelles.
- Les consignes longues ne sont pas traitées, tout comme l’humour ou les expressions imagées.
- Sur le plan social, ce sont des enfants qui peuvent développer une phobie scolaire ou des difficultés relationnelles avec leurs pairs, dont ils ne comprennent pas les jeux, ni les blagues.
Les troubles associés
On observe fréquemment des troubles associés à la dysphasie, sur le versant oral et écrit :
- Une dyslexie qui affecte les compétences en lecture.
- Une dysorthographie qui provoque des difficultés dans le passage à l’écrit, dans la transcription de mots et de phrases.
- Un trouble logico-mathématique puisque les capacités d’abstraction sont fragiles.
En cas de doute, il est important de consulter une orthophoniste. Sa mission sera de faire le distinguo entre un trouble de langage oral dit « classique » et une dysphasie. Obtenir un diagnostic précis va permettre de mettre en place des aménagements pour préserver les apprentissages scolaires.
Quels professionnels consulter pour dépister une dysphasie ?
Le bilan orthophonique au cœur de la démarche diagnostique
Le professionnel spécialiste de la dysphasie est l’orthophoniste. En libéral ou en centre de consultation, elle est habilitée à poser le diagnostic et à élaborer un plan de prise en charge. Celui-ci est primordial pour permettre à l’enfant d’apprendre comment compenser ses troubles et comment faire évoluer son langage.
L’orthophoniste va proposer à l’enfant un bilan ciblé et peut aussi lancer des pistes de diagnostic complémentaires, notamment pour faire le diagnostic différentiel avec un retard de langage oral dit « simple » :
- Bilan psychologique ou neuropsychologique, pour évaluer le potentiel intellectuel, l’attention ou encore la mémoire ;
- Bilan psychomoteur, pour évaluer les capacités de repérage spatio-temporel, notamment.
- Bilan avec un neuropédiatre, pour analyser le développement neurologique de l’enfant.
La rééducation orthophonique de ce trouble du langage
Votre orthophoniste va conseiller une prise en charge à la fois intensive et prolongée, puisqu’il s’agit d’un trouble persistant et structurel. Souvent, le rythme proposé sera au minimum de deux séances par semaine. Par ailleurs, suivant la nature des troubles, la prise en charge pourra/devra être pluridisciplinaire.
Lors de cette prise en charge orthophonique, il va être question de :
- Stimuler les possibilités de langage, versant compréhension et expression.
- Développer des outils de compensation pour contourner les difficultés.
- Travailler à la mise en place d’adaptations dans le milieu scolaire.
Comment aider un enfant dysphasique ?
Si la prise en charge orthophonique va permettre de stimuler les capacités langagières de l’enfant, il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’un trouble structurel et durable. Il va donc falloir apprendre à vivre avec et trouver des moyens de compensation pour préserver les apprentissages scolaires, notamment.
Souvent, les enfants dysphasiques ont du mal à comprendre le monde qui les entoure : les jeux des copains, les consignes à l’école. Cela peut les amener à développer une grande fatigabilité, un comportement d’évitement ou a contrario, agressif.
En tant que parents, vous pouvez aider votre enfant au quotidien, mais aussi solliciter des aménagements auprès des enseignants.
À l’école
- Prendre le temps d’échanger avec l’enseignant sur les spécificités de la dysphasie, sur les problèmes de comportement qui peuvent en découler.
- Demander à réduire la participation orale.
- Utiliser des pictogrammes pour renforcer la compréhension des consignes par un support visuel.
- Proposer à l’enfant de travailler sur ordinateur.
- S’assurer auprès de lui qu’il a bien compris une consigne.
À la maison
À retenir : la dysphasie est un trouble structurel, qui ne dépend pas de la volonté de l’enfant. Lui demander de « faire des efforts » ou lui pointer systématiquement ses erreurs est contre-productif et peut affecter durablement sa confiance en lui.
- Misez sur les livres audio ! C’est un support intéressant pour baigner dans du langage oral, tout en suivant sur le support écrit.
- Soyez un partenaire de communication actif. Lorsque votre enfant cherche ses mots, laissez-lui du temps, fournissez-lui la première syllabe si besoin pour éviter le découragement.
- Veillez à toujours avoir un contact visuel ou physique avec votre enfant pour vous assurer d’avoir capté son attention
- Formulez une consigne à la fois, avec des mots simples et concrets.
- Jouez pour développer le vocabulaire. Devinettes, mimes, intrus, Vocabulon ou Pictionary… Le singe qui répète est aussi un objet très ludique pour répéter des mots dans la bonne humeur : fou rire assuré !
- Proposez des moments de méditation ou même des séances de sophrologie pour aider votre enfant à cultiver le calme, apaiser d’éventuels troubles du comportement et favoriser son bien-être global.
Une dysphasie peut avoir des répercussions significatives sur le développement d’un enfant dans la sphère scolaire, mais aussi familiale et sociale. En cas de doute, n’hésitez pas à consulter votre médecin généraliste ou pédiatre. Il saura vous orienter vers les professionnels compétents, orthophoniste en tête. En tant que parent, votre rôle est d’informer l’entourage de l’enfant et de lui fournir un environnement sécurisant pour qu’il puisse y déployer toutes ses capacités