Lorsqu’on s’intéresse au développement des nourrissons, on entend parler des réflexes primitifs et archaïques. Ce sont des mouvements autonomes présents chez les bébés, qui jalonnent leur développement et témoignent de la maturation de leur système nerveux. Peut-être avez-vous ainsi déjà entendu parler du réflexe de Moro ou de Babinski ? Ces réflexes disparaissent spontanément, lorsqu’ils sont intégrés par le système nerveux, laissant place à l’étape psychomotrice suivante. Or, on s’est aperçu que parfois, certains réflexes ne s’intégraient pas au niveau du système nerveux, n’évoluant pas vers des mouvements plus volontaires. Le système nerveux s’en trouve surchargé, ne permettant pas au sujet d’exprimer pleinement ses capacités, non seulement psychomotrices, mais aussi cognitives. Quelles sont les implications pour les enfants porteurs de troubles dys ? On en parle !

Qu’est-ce qu’un réflexe archaïque ? 

Un réflexe archaïque est le plus souvent présent dès la naissance d’un bébé. Ces mouvements autonomes ont une mission : assurer la survie du bébé. Vous avez sûrement entendu parler du réflexe de Moro et de celui de Babinski ? 

  1. Le réflexe de Moro

Si on surprend un nourrisson (mouvement ou bruit brusque) ou s’il se sent partir soudainement vers l’arrière, il étend automatiquement ses bras et ses jambes, puis contracte ses membres. C’est ce qu’on appelle le réflexe de Moro

Lorsqu’il ne s’intègre pas et qu’il reste présent au-delà de 6 mois, il peut provoquer une hypersensibilité aux stimuli, comme si la sphère motrice et cognitive était en hyper vigilance permanente, n’autorisant pas la disponibilité attentionnelle pour d’autres tâches d’apprentissage.

  1. Le réflexe de Babinski

Lorsqu’on stimule la plante des pieds du nouveau-né, on constate une extension des orteils et un étalement de la voûte plantaire : c’est le réflexe de Babinski.

Sa perturbation peut donner lieu à des retards de langage oral, de la marche, des troubles de la posture, des problèmes de mâchoires entraînant une déglutition atypique.
Ces 2 réflexes (entre autres) sont à la base du développement global de l’enfant. Car, sans compétences motrices, il n’y a pas d’exploration de l’environnement de l’enfant, et donc pas ou peu de développement des compétences sociales et langagières.

Réflexes archaïques chez le bébé

3.
Le RTAC (Réflexe Tonique Asymétrique du Cou)

Le RTAC est observable chez un bébé couché sur le dos. Quand il tourne la tête à droite, par exemple, le bras et la jambe droite s’allongent tandis que les membres du côté opposé se plient. Dans un développement harmonieux, il devrait être intégré et disparaître vers 6 mois. 

Sa non-intégration provoque des difficultés de repérage spatial, une maladresse globale, des troubles de l’attention ainsi que des difficultés d’ordre cognitif (troubles dys, troubles des apprentissages).

Ces réactions motrices involontaires apparaissent puis se succèdent, pour peu à peu disparaître, autour de l’âge de deux ou trois ans, après avoir suffisamment stimulé le système nerveux central. 

Les réflexes laissent la place à des mouvements progressivement contrôlés et « matures », notamment la marche. On dit alors qu’ils sont intégrés au système nerveux, même s’ils restent en sommeil, réapparaissant de façon réflexe, à tout moment de la vie, en situation de danger ou de survie, par exemple. 

Réflexe archaïque ou réflexe primitif ? 

Contrairement aux réflexes archaïques, les réflexes primitifs n’ont pas vocation à assurer la survie, la protection du nouveau-né. Ils jalonnent le développement moteur du bébé, puis ils disparaissent au cours des premiers mois de vie. On peut penser au réflexe de marche automatique ou à celui de natation. Dans ces deux cas, lorsque le bébé est placé en position de marche/natation, les mouvements involontaires adéquats se produisent spontanément. 

Comme les réflexes archaïques, sur le plan global, ils participent au développement de l’équilibre, de la perception de l’espace et à l’acquisition d’habiletés telles que la marche ou la coordination motrice. Le hic, c’est que si ces réflexes sont perturbés et s’ils ne disparaissent pas spontanément, ce sont ces mêmes domaines qui peuvent alors être mis en difficulté. 

D’un point de vue orthophonique, on peut observer ces perturbations chez des enfants porteurs de troubles des apprentissages : dyslexie, dysgraphie… 

Rééduquer les réflexes archaïques dans le cadre de troubles des apprentissages 

Lorsque les réflexes archaïques n’ont pas été intégrés, c’est comme si le socle des apprentissages de l’enfant était fragilisé. Ces réflexes peuvent donc faire l’objet d’une prise en charge spécifique, auprès d’une orthophoniste formée, par exemple, associée à une prise en charge « classique » des troubles dys. 

Comportements pouvant être le résultat de réflexes non intégrés

On peut observer : 

  • Un trouble de l’oralité ou de la déglutition.
  • Une respiration buccale. 
  • Des gestes maladroits, désordonnés, une position assise inhabituelle.
  • Des gestes impulsifs, pouvant paraître abrupts.
  • Des difficultés d’attention ou de concentration. 
  • Des émotions débordantes ou une timidité particulière.
  • Un trouble des apprentissages.
  • Des difficultés de mémorisation, d’organisation. 

Ces réflexes non intégrés peuvent finalement parasiter toutes les sphères du développement : motricité, cognition, psycho affectivité. Lorsqu’ils ressurgissent, ils perturbent la vie de l’enfant, car ils provoquent des réponses réflexes non adaptées à l’âge ou aux compétences attendues. On retrouve alors des enfants qui ne comprennent pas pourquoi ils n’y arrivent, qui s’épuisent à compenser leurs difficultés, en vain. 

Avec tout ce que cela implique évidemment au niveau de la confiance en soi et des relations aux autres.

Bénéfices d’une prise en charge des réflexes archaïques

Travailler les réflexes archaïques permet de consolider le socle et de libérer des compétences pour accueillir les apprentissages. Comme si on enlevait à l’enfant une épine dans le pied. 

 Au fil de la prise en charge, on peut constater : 

  • Une posture plus efficace.
  • Des capacités attentionnelles qui se libèrent.
  • Un meilleur geste graphique.
  • Des performances majorées en langage oral et écrit. 
  • Une meilleure coordination oculomotrice. 
  • Une latéralisation qui se fiabilise. 
  • Une meilleure gestion des émotions et de l’estime de soi. 
  • Une sphère orofaciale plus tonique. 

Cette prise en charge peut se dérouler en complément d’une prise en charge orthophonique classique, portant sur les symptômes du trouble dys, par exemple.

Réflexes archaïques et orthophonie

La rééducation des réflexes archaïques et primitifs

Lors des séances de prise en charge, on va proposer à l’enfant des exercices spécifiques venant stimuler les compétences clés, en lien avec le réflexe à travailler. 

On évoque souvent la méthode Padovan ou l’IMP (Intégration Motrice Primordiale) comme outil de rééducation.

  • Exercices de balancement avec des bascules, des coques rigides ou un hamac.
  • Exercices de coordination oculomotrice (œil/main) : transvasement, lancers de balle…
  • Exercice de respiration et de régulation des émotions.
  • Exercice de détente musculaire et de lâcher prise. 
  • Exercices d’équilibre.

Cette prise en charge s’appuie sur la plasticité du cerveau des enfants, c’est-à-dire sa disposition à se “réordonner” et à créer de nouvelles connexions, pour améliorer le contrôle exercé par le cortex.

En conclusion, disons que cet accompagnement des « précurseurs » des difficultés de l’enfant permet d’optimiser la prise en charge orthophonique classique ou bien de l’écourter. C’est donc une piste à investiguer, dans le cadre d’un accompagnement multimodal d’une dyslexie, par exemple. N’hésitez pas à en parler avec votre orthophoniste, qui saura vous diriger vers des consœurs ou confrères formés en IMP, par exemple. Un outil de plus à ajouter au panel des aides à proposer aux enfants porteurs de troubles dys !

Ressources pour mieux comprendre les réflexes archaïques